Rostand et Jammes
Douze hectares pour cette luxueuse demeure de l’architecte Tournaire . Des chênes et arbres somptueux replantés dans leur âge avancé, un parc à la française avec des croisées de parterres symétriquement fleuris, un jardin à l'anglaise, les éventails bleu divin des paons, la calèche de l’écurie, le coin des poètes avec les statues de Shakespeare, Hugo, Cervantès,le bassin pour canoter et pour que s’y mire la belle demeure dans toute la hauteur de ses quarante pièces.
C’est Arnaga à Cambo , la villa d’ Edmond Rostand : hauts plafonds , parquets précieux, marquèteries, inclusions de nacre, vitraux, des nus d'Hélène Dufau , des fresques de Delaw, des tableaux de Veber... des photos des plus grands acteurs de Coquelin à Sarah Bernhard en passant bien sûr par Rosemonde Gérard et Mary Marquet ses épouses, et des visiteurs : Paul Faure , Barthou, Anna de Noailles et les autres venus de Paris. La pendule à quatorze heures de Vian. Enfin, l’épée de l’ académicien et une œuvre : Cyrano, Chanteclerc, l’Aiglon…toujours moderne et reconnue.
Orthez, en dégringolant de la tour Moncade : La maison béarnaise Crestia . Simplicité de la maison de quatre pièces de Francis Jammes. Seul ornement ,
la grande cheminée rustique et les vieux carreaux rouge et blanc. La modestie d’un homme qui s’attachait aux paysans des chemins, aux ânes et aux animaux de basse-cour, aux fleurs des talus, aux
rêves de jeunes- filles.
Il a pourtant rencontré ici Gide, Mauriac, Claudel et Odilon Redon. Il n’alla cependant pas à Paris. Il n’y eut pas l’épée d’ Académicien. Il garda son béret rivé à sa tête et sa longue barbe blanche. Ses poèmes sont tombés dans l’oubli , ses rimes semblent démodées. Mots trop simples et pourtant si pleins, tendus d'évocation sensible.
Il habite si près, à quinze kilomètres de chez moi et je le découvre grâce à ce poète catalan rencontré à Noël ,à la maison de Victor Hugo et
que j’accueille cette semaine à Baigts . Nous irons redire ses poèmes dans tous les villages où il est passé: Sallespisse, Ste Suzanne, St Boes. J’ai hâte !
Mais une question reste : pourquoi Rostand et Jammes , qui habitaient si près, ne se sont-ils jamais rencontrés ?